if we meet each other in hell, it isn't hell (ft. Darlington)

Se faire envoyer en Enfers n'avait pas vraiment été dans les plans de Darlington pour son futur. Non, vraiment, il pensait plutôt trouver un bon job, rénover sa maison Black Elm, peut être se trouver quelqu'un et vivre une vie tranquille. Aussi tranquille que possible en connaissant l'éxistence de la magie et des sociétés secrètes de New Haven. A la place, Darlington se retrouvait en Enfers et souffrait le martyre tous les jours. Il n'était pas mort, pas encore, mais le monde autour de lui comptait bien s'occuper de son cas non-stop. Les jours et les nuits n'avaient aucune distinction dans cet endroit. Est-ce que Léthé recherchait Darlington ? Combien de temps s'était-il écoulé ? A en juger par son mental vacillant, cela devait faire quelques mois déjà. Un an ? Peut être, il n'avait aucun moyen d'en être sûr.

A ce moment précis, Darlington se trouvait dans un coin de l'Enfers -si l'on pouvait appeler ça un coin. Assit au sol, il se faisait assaillir encore et encore des idées et pensées les plus sombres, les plus déprimantes possible. De la torture mentale, super. Il tentait tant bien que mal de garder espoir, de ne pas succomber à tout ce qu'il subissait mais ça devenait de plus en plus difficile. Les Enfers ne lui offraient aucun répis.

Les premiers temps, Darlington s'était attaché à sa rancoeur contre Alex Stern, se disant sans cesse que s'il arrivait à sortir de là, il allait faire de sa vie un enfer. Peu à peu, il n'avait même plus eu l'énergie de lui en vouloir. Il avait besoin de toutes ses forces pour survivre et vraiment, il n'avait le temps de rien faire d'autre.

Assit dans son coin comme il était, d'autres âmes damnés venaient vers lui pour accentuer sa torture. Les morts lui faisaient payer d'être vivant.

Ah! Patience et je vais bientôt vous rejoindre...

Darlington n'était que l'ombre de lui même. Ce n'était plus qu'une question de temps. Peut être que la chance serait de son côté. Peut être qu'elle l'était déjà. Il allait fermer les yeux alors qu'une femme avec un trou béant dans l'abdomen se postait devant lui quand du mouvement au loin attira son attention. Plusieurs morts avançaient tous d'un pas décidé vers le même endroit. Cela n'arrivant jamais en Enfers. Intrigué et réveillé, Darlington se leva d'un bond. Son cerveau se remettait enfin en marche et sa curiosité guida ses pas alors qu'il suivait le même chemin que les morts.

D'un coup, il comprit ce qu'il se passait quand une jeune femme brune déboula en courant. Il connaissait cette fille ! Il l'avait maudit pendant des heures mais qu'est-ce qu'elle foutait là ?

"Stern !" Il tenta un cri mais sa voix s'enraya et il se mit à tousser.

Si sa voix était inutile alors ses jambes feraient l'affaire et il se mit à courir après la brune pour tenter de la rattraper avant les morts. La voir faisait remonter toutes les émotions qu'il n'avait pas ressenti depuis des semaines si bien qu'il ne savait pas lui même comment il réagirait s'il venait à la rattraper.

Je sais que je n'ai pas agi vraiment en faveur de Darlington. Et pendant un instant je me suis vraiment dit que me débarrasser de lui me permettrait d'être en paix à Yale ; que jamais rien ne viendrait changer le fait que je pouvais enfin avoir une vie et la vivre. Que je ne serai plus jamais dans un cercle vicieux. J'ai eu tort et ça me rendra toujours malade de savoir qu'il était le seul qui aurait pu réellement m'accepter pour qui je suis. Le pire ça a été de constater que son absence était pire à ressentir que sa présence ; que ses manières de gentleman me manquaient ainsi que sa manie de toujours tout régler par le passage d'un livre avant de me gratifier d'un "Vous n'avez toujours pas lu ce que je vous ai conseillé". Même dans ses moments les plus agaçants, je me suis retrouvée à l'apprécier et à regretter mon geste.

Maintenant, je viens presque à regretter d'être venue jusqu'ici face à cette horde de mort-vivants. Mais quelle idée de merde Alex - je sais que je suis la pro pour en avoir mais c'est pas possible d'être aussi conne, vraiment. Je n'arrête pas de m'insulter de tout les noms d'oiseaux possible, dans toutes les langues que je connais, ça ne fait quand même pas beaucoup mais c'est suffisant pour me faire comprendre que je suis vraiment un cas désespéré. Je me dis que Darlington trouverait mon geste stupide et périlleux. Mais je suis venue pour le sauver, alors s'il me fait une remarque du genre, je lui claque juste dans la tronche que je peux le laisser avec les genres de zombies.

Je continue à, littéralement, courir pour ma vie. Je tente de courir et d'observer en même temps, ce qui est plus compliqué à faire que ça en a l'air. Après quelques minutes je commence à avoir une petite douleur à un de mes poumons. Bordel, faut vraiment que je cours pour le plaisir et pas pour sauver ma vie. Soudainement, il apparait sur mon chemin. Reconnaissable entre tous. En même temps, un vivant parmi les morts, ça ne peut pas être discret. Mais je l'aurais reconnu rien que par la sensation de magie qui émane toujours autour de lui, peu importe les circonstances, peu importe à quel point il peut faire sombre ; il croit en la magie et celle-ci lui répond. Un phénomène qui ne se produit qu'avec lui. Sans attendre une preuve de plus, je m'élance vers lui avec un second souffle inespéré. Une fois près de lui j'arrête enfin ma course effrénée pour le serrer dans mes bras, soulagée de l'avoir retrouvé. Cette fois, je ne l'ai pas laissé tomber.

-Je suis désolée de t'avoir laissé tomber. Je- je suis venue pour sauver tes fesses. Et si j'avais un peu plus de temps je t'expliquerais la suite mais y a des zombars qui nous coursent et j'aurai pas de troisième souffle. Alors tu bouges tes jolies fesses et on se tire d'ici, je dis en l'emmenant à ma suite, pas très chaude à l'idée de refaire le trajet que j'ai fait... dans l'autre sens. Donc vers l'ennemi qui est en masse.

Plus Alex se rapproche et plus les émotions de Darlington deviennent un chaos sans nom. Il se sent trahis, blessé, soulagé, content, enragé, froid, vide et bien d'autres choses dont il ne saurait pas coller d'étiquette. Tout se bouscule dans sa tête comme s'il ne s'était écoulé que quelques minutes depuis que le portail l'ayant aspiré et à la fois des décennies. Alex était-elle en enfer pour finir le travail ? Pour l'achever tant qu'elle pouvait ? Ou alors était-ce encore une hallucination ? Darlington avait du mal à faire la différence entre les illusions et la réalité. Alors pourquoi courait-il vers elle ? L'espoir. Il n'avait plus que ça, le seul filin le raccordant encore au monde des vivants. Les morts n'avaient pas réussis à aspirer tout son espoir.

Puis Alex est là, à quelques mètres puis centimètres de lui avant de se jeter dans ses bras. Son premier reflex est de lui rendre son accolade. Sa chaleur lui fait tellement de bien qu'il ne pourrait pas être capable de la relacher sans y être forcé. Ensuite viennent les émotions et leurs tourments. Avec ses bras autour de la brune, l'envie de lever les mains vers sa gorge pour l'étrangler traverse son esprit en même temps qu'une autre, l'envie de l'embrasser à pleine bouche. Son côté sauvage jusqu'à lors insoupçonné lui cris de la morde et son côté gentleman de la serrer un peu plus doucement contre lui.

Perdu dans la tempête qu'est devenue son esprit, Darlington enregistre à travers le brouillard qu'Alex dit venir pour sauver ses fesses. Bien, au moins il peut se rattacher à ses mots. L'ouragan se calme un peu maintenant que sa ligne de vie est lancée : Alex est là pour le sauver, pas la peine de l'étrangler ni la morde pour l'instant. Une chose à la fois Darlington, une Alex inerte ne pourra pas te sauver.

Darlington n'essaye pas vraiment de parler, bien conscient que ses cordes vocales sont meurtries. Il se contente de se laisser entrainer par la brune. Quand leur trajectoire devient claire, il la tire vers le côté pour contourner la meute. Peut être est-ce l'espoir ou alors les quelques secondes de chaleur humaine mais Darlington retrouve de l'énergie, suffisamment pour courir plus vite et emporter Alex avec lui. Les morts sont rapides mais pas autant qu'un Darlington voulant vivre et s'échapper de cet enfer.

"Où ?"

Conscient de sa voix d'outre tombe, Darlington ne fait l'effort que pour un simple petit mot. Alex est maligne, il le sait pertinemment, alors elle comprendra ce qu'il veut dire. Où doivent-ils aller pour échapper des enfers ?

Je n'ai jamais été aussi contente de revoir Darlington et de pouvoir le serrer dans mes bras ─ surtout quand dès le début, on a eu beaucoup de mal à s'entendre. Je rappelle qu'il a quand même laissé une horde de chacals m'attaquer et n'a donné le mot pour les stopper qu'au dernier moment, avant que je ne me fasse totalement déchiqueter par ces bestioles. Cependant, je vous accorde qu'il ne méritait pas que je le laisse se faire gober par un monstrueux portail et que par la suite... Eh bien, il m'a aidée. A sa manière un peu trop gentleman et intello quand il aurait fallu faire brûler entièrement Yale, tout cramer pour repartir à zéro, mais il m'a aidée. Sincèrement. Il a effacé mes tatouages, il a réparé mes conneries, il sait ce que j'ai fait et il ne l'a pas dit. Mais je suis une survivante ; j'ai protégé mes fesses avant de penser à tout ce qu'il a fait pour moi. Néanmoins, si notre cher gentleman du Léthé se retrouve en Enfer, c'est parce qu'il a accompli un crime. Et ça, c'est une information non négociable. Darlington n'a pas l'air d'être le genre de personne à tuer ─surtout quand je sens ses bras autour de moi, quand je me rappelle de la nuit passée à Black Elm, après la fête de la maison Manuscrit. Mais j'ai l'impression que si je le sers un peu plus, il va se briser tellement je sens ses os et... bon, il empeste un peu la mort. De ma faute. Alex, il faudra plus que le sauver pour te faire pardonner.

Pas le temps de niaiser, je trouverai un moyen de lui faire les yeux doux plus tard. Je trouverai un moyen de réaliser ce rêve ; tu me serviras et m'aimeras, même si ce sont deux choses différentes. Le souvenir de ce rêve et cette pensée me pétrifie un bref instant, un instant suffisant pour que Darlington me tire pour éviter un mort-vivant. C'est qu'il court plus vite que moi alors qu'il a passé plus de temps en Enfers ! Je le suis en utilisant mes dernières forces qui vont pourtant devoir durer encore de trop nombreuses minutes. Ah, un jour je vais me payer un abonnement à la salle de sport ! .. Quoique les fantômes feraient des choses glauques là-bas. Brr.

-Vers l'infini et l'au delà ! .. On doit aller vers la lumière et remonter vers le royaume. Y aura des gardes pour contenir les zombies. Mais interdiction de s'arr- HOLY FUCKING CHRIST ! je crie en esquivant une flèche.

Ils sont armés maintenant ?! Je retourne vite ma tête pour constater qu'il y a un certain update des mort-vivants. Ils sont armés et ils ont des sortes d'armures, et y a cette sensation familière. Quand je disais que Darlington appelait la magie à lui, j'aurais préféré que ça ne soit pas tout le temps vrai. Les yeux ronds, je le regarde et je lui fais signe de tracer parce que nos deux vies en dépendent. Je serre un peu plus sa main dans la mienne, comme si j'avais la capacité de les ligoter pour qu'on ne s'abandonne plus et je trouve par miracle un troisième souffle en constatant qu'en plus, ils ne sont pas des Stormtroopers incapables de viser correctement.

-Je déteste les morts ! J'espère que le gentleman du Léthé fera honneur à sa réputation pour un tel sauvetage !

Une fois la main d'Alex dans la sienne et leur destination dans sa ligne de mire,Darlington oublia à quel point il était lavé émotionnellement, à quel point il avait faim et soif, à quel point tout son corps hurlait de douleur. il ne pouvait plus penser qu'à une chose : sortir vite d'ici avec Alex. Darlington ne voulait pas passer une minute de plus aux enfers, pas après y avoir passé autant de temps. Leur but était si proche mais semblait si lointain. Son corps allait-il tenir le coup ? Ses poumons et ses muscles étaient en feu, des signaux d'alertes fusaient partout à travers son corps si bien qu'il ne sentirait même pas si un projectile venait à le toucher. Etait-ce possible de ressentir autant de souffrance ? Son coeur serait-il le premier à dire adieu ?

La chaleur de la main d'Alex semblait être sa seule source de non-douleur. S'il pouvait juste se concentrer sur ça pendant quelques instants, juste assez pour qu'ils s'échappent et il pourrait attendre d'être dans le monde des vivants pour faire sa crise cardiaque en paix. Juste quelques minutes à tenir. Darlington serra la main d'Alex, sentant qu'elle faisait de même. Savoir qu'Alex était là pour lui, qu'elle fuyait comme lui, qu'elle était en danger comme lui aida Darlington à tenir le coup et garder la cadence. Une autre vie dépendait de leur course folle et cela suffisait au Gentleman du Léthé pour ne pas lâcher prise. Alex sembla également retrouver un peu d'élan car elle accéléra sa course, repassant devant lui alors que des flêches volaient dans leur direction.

Darlington n'osa pas jeter un coup d'oeil derrière lui, de peur que perdre de vue le portail ne le fasse disparaître ou alors que le mouvement brusque ne soit de trop pour son corps déjà à bout. Non, toute son attention restait sur le portail de lumière et sur la main dans la sienne.

Dans le brouillard de ses pensées, Darlington entendit quand même Alex et à ses mots, il ne pu s'empêcher de rouler des yeux. Malgré son manque de souffle et sa gorge en piteux état, le jeune homme ne pouvait pas laisser une telle remarque sans replique.

"Sors moi déjà de là et on verra ensuite."

Il finit ces quelques mots en toussant et manquant presque de se prendre le pied dans une pierre et il n'était même pas certain que sa voix ait été compréhensible pour Alex tant elle était rauque et faible. Qu'à cela ne tienne, dès qu'il irait mieux, Alex allait entendre sa voix non stop pendant des jours. Ô si elle savait ! Darlington avait tant à lui dire et beaucoup trop de point sur les i à mettre. Et en même temps, il avait envie d'occuper leurs lèvres avec bien d'autres choses. Bien, bien d'autres choses plus plaisantes... mais seulement après l'avoir étranglé une bonne douzaine de fois !

Dès qu'il passa le portail hors des Enfers, Darlington laissa toutes les forces qu'il lui restait s'envoler. Si Alex s'étala au sol, Daniel lui s'écroula comme un vieux sac à patate lâché sans ménagement. Il n'eut ni la force ni même le reflexe de mettre ses mains pour rendre la chute moins violente. Non, il tomba simplement face la première au sol. Un grognement échappa ses lèvres meurtries puis une toux sèche qui finit de l'achever. Tout devenait noir autour de lui et un coin de sa tête lui criait qu'il allait perdre connaissance d'une seconde à l'autre. Il ne voulait pas, pas maintenant, pas quand il venait à peine de sortir des Enfers et que lui et Alex avaient besoin de parler. Vraiment, ce n'était pas le moment. Pourtant, son coeur en décida autrement et après un dernier regard à la brune tatouée à côté de lui, Daniel sombra.

Darlington ne resta pas inconscient bien longtemps. Il revint à lui en criant et en se débattant, son esprit en retard pensant qu'il était toujours dans les enfers et entouré de monstres. Il poussa Alex sans la voir puis rampa le plus loin possible jusqu'à ce que son dos ne rencontre un mur. Un mur ? A travers la panique embuant ses pensés, Darlington parvint à se rendre compte qu'il était maintenant dans le monde des vivants à nouveau. Son regard paniqué se posa sur Alex pendant un moment puis il fut à nouveau assailli de toutes ces émotions dont il ne savait quoi faire.

L'envie de lui crier dessus, de la serrer dans ses bras, de la secouer jusqu'à ce qu'elle avoue la vérité, de l'embrasser jusqu'à en perdre leur souffle... Tout se bousculait dans sa tête et Darlington ne savait pas quoi faire à part resté assis là, dos au mur et regard ne quittant pas l'ex-junkie. Peut être retrouvait-il ses instincts et ses doutes un peu trop vite. Peut être avait-il perdu confiance en elle, même après qu'elle l'ait sauvé il y a quelques minutes à peine. Mais une question prenait le dessus sur tout le reste.

"Combien de temps ?"

Sa voix craqua et il se racla la gorge avant de tenter à nouveau, le volume ne dépassant pas le murmure faible.

"J'ai passé combien de temps là bas ?"

Darlington ne voulait pas pensé aux enfers et à son temps dans ce monde horrible mais il ne pouvait pas s'empêcher de penser à tout le reste, à tout ce qu'il avait surement loupé. Comment allait son chat ? Est-ce que sa maison lui appartenait toujours ? Comment allait Léthé et les autres sociétés ?